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Tête à l'envers & acide salicylique |
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L'autre jour (mardi 17 mai 2005)
je marchais dans Paris, direction l'Institut de France. Passant par le
quai de l'Horloge sur l'île de la Cité je remarque deux drapeaux
au-dessus du porche d'entrée de la Cour de Cassation. J'ai l'œil attiré.
Quelque chose ne va pas. Je m'approche. Je prends bien le temps de vérifier.
Eh non ! Ça ne va pas du tout. Le drapeau européen est à l'envers. Il a
la tête en bas. Dans un premier temps, je me dis que
c'était peut-être un argument symbolique quasi-philosophique, pour faire
réfléchir aux véritables fonctions de la Cour de Cassation. Ce
raisonnement forcément primaire n'était-il pas trop torturé, sinon
pervers ? À quelques jours d'un référendum
qui nous demande de nous prononcer sur le projet de Traité de
Constitution Européenne, j'avais la tête prise par toutes les difficultés
d'interprétation de ce texte, sinon ses ambiguïtés, et je me demandais
presque quel signe du ciel viendrait apaiser ma migraine. Reprenons. Projet de Constitution Européenne.
Article I-8. Voici la description symbolique
exacte du drapeau européen : Ce qui n'est pas précisé dans cette
description c'est l'orientation de ces étoiles à 5 branches. Droites,
renversée ou orientées circulairement par rapport au centre. Il faut
encore la description géométrique (cf. annexe en bas de page) pour apprendre qu'elles
sont droites. Détail auquel le Conseil de l'Europe tient. Par le passé,
j'ai eu à connaître le travail d'une entreprise de façonnage qui avait
renversé ce symbole. Tout est parti au pilon. Le préposé au drapeau de la Cour de
Cassation n'est pas consciencieux. C'est une certitude. Mais il n'y a
personne pour le lui dire. Et ça, c'est peut-être beaucoup plus gênant.
Ou alors, c'est voulu. Dans ce cas... À l'Académie des Sciences où
j'allais donc d'un bon pas, la tête en l'air et presque dans les étoiles,
était donnée une conférence sur les plantes supérieures, divines et/ou
diaboliques, selon le point de vue auquel on se place, avec pour débuter
une anecdote assez drôle et pourtant presque tragique. Roland DOUCE, un
grenoblois à la voix éponyme nous explique en effet que la conférence
n'aura pas lieu comme prévue. Un accident irrattrapable de son logiciel
de présentation (PowerPoint) l'a désespéré la veille au soir. Alors
qu'il avait déjà renoncé, un sursaut pathétique l'a fait veiller de
façon presque frénétique jusqu'à 4 heures du matin pour rédiger le
texte reconstituant son discours. Discours qui nous a été donné, à
l'ancienne, sans aucun support visuel. Une diction parfaite servie par un
verbe poétique et des exemples très imagés d'effets biologiques parfois
bien paradoxaux de molécules aux noms des plus exotiques°°° ont fait
ressortir l'essence de son propos de façon assez extraordinaire. °°° chacun imaginait aisément
les formules dont nous étions privées : bien trop compliquées ! Pour ma part, prévoyant toujours ce
genre d'incident j'ai l'habitude d'amener avec moi un jeu de transparents
qui permet, à moindre frais, de ne pas être désarmé quand le mauvais
sort informatique s'acharne. Évidemment si le réseau électrique
s'effondre suite à un accident de transformateur local ou bien pire, si
une tempête séculaire s'en mêle, le rétroprojecteur ne marchera pas
non plus. Et mon plan B serait à l'eau. Mais au moins, ma responsabilité
serait déjà moins voyante. Si je dois prendre une leçon de ce qui s'est
passé ce jour-là, c'est peut-être bien d'articulation verbale que je
devrais me soucier comme beaucoup de ceux qui sont parfois amener à
enseigner. Oser monter sur les planches et apprendre à déclamer du
Corneille, voilà peut-être une corde utile à l'arc du chercheur qui veut
rendre sa passion communicative. Le Cid... Des images, il en faut pour
s'adresser aux foules étudiantes, ou pas. Nos dirigeants élus, ou pas,
aiment bien les agiter comme des symboles sur le ciel de nos espérances.
Il ne faudrait pas que des étendards, mal tricotés, signalent qu'une
retraite aux allures de déroute est la direction à suivre. Alors quand
le drapeau de l'Europe se signale la tête en bas au fronton d'une des
Institutions fondamentales de la République, je me dis que, eh bien oui
finalement, la Cour de Cassation n'est pas neutre. Elle a son opinion. Cette aide opportune d'interprétation
m'a fait réfléchir davantage. Trop ? Finalement, ce cercle de 12 étoiles
représente une constellation, qui n'existe pas dans le ciel, imaginée
par quelques hommes manquant de paranoïa élémentaire, celle qui assure
la survie. Et si ces 12 étoiles à 5 branches représentaient précisément
les hommes. Douze tribus, sinon familles, peut-être ? Une au sommet, près
du ciel. Les élus ? Ceux qui se sauveront quoiqu'il arrive. Une en bas,
les pieds ancrés dans la terre, sur laquelle tout repose finalement. La
confrérie Atlas, peut-être ? Des espèces de prêtres qui aident les
Dieux pour ordonner les Puissances Chtonniennes ? Sinon des sortes de
chamanes, medecine-men, qui font remonter les aspirations de la terre d'en-bas
vers le ciel d'en-haut et essayant de donner assez de puissance à chacun
pour que cet équilibre de cirque circulaire tienne d'aplomb ? Et bien, de nos jours, les Atlas
boitent bas, les chevilles endoloris par les casse-pieds titularisés.
La santé de nos civilisations auto-proclamées d'élite, s'écroule littéralement
: diabète, obésité, cancer, maladies allergiques, explosion des iatrogénies,
épidémies gravissimes demain peut-être. Certains proclament que les
pesticides, les résidus plastiques, les dioxines, les métaux lourds, ce
n'est rien que du vent. Que la nature fait bien pire et que cela ne nous
empêche pas de vivre. Et que le salut vient de l'hormesis... Mithridate,
pas mort. Effectivement, il agonise sur le flanc et veut toujours
convaincre que ceux qui vivent couchés ne risquent pas de se faire écraser.
Ce drapeau la tête en bas, pourquoi ne montrerait-il pas, après tout,
qu'à force de saper tous les jours davantage les fondements de notre santé,
nous arrivons effectivement à la gloire de l'homme debout ? Seulement,
cet homme-là marche sur les mains, la tête à l'envers. Il habite la
planète Shadok. Pour que l'Europe tourne rond, il
faut rejeter les engrenages biaisés, dédicacés au broyage menu des
charlots mécaniques des temps modernes. La France sera toujours la France, et
les français, des râleurs utiles, incapables de marcher au pas, qui
n'aiment que rire, chanter et aimer : le seul programme électoral qui
fait avaler toutes les pilules amères, pourvues qu'elles ne soient que
provisoires. Et puis, avant toute chose, nous aimons que les symboles qui
expriment les notions fondamentales de notre communauté d'égaux, soient
affranchis de toute ambiguïté, de celle qui laisse supposer une
quelconque servitude. Cette liberté, à laquelle nous sommes attachés
par dessus tout, doit être et bien dite et bien montrée. À l'endroit. Sur le trajet du retour, alors que je
passai par l'autre extrémité de l'île de la Cité, derrière
Notre-Dame, un jardin en coin m'interpella et un arbre du genre Salix (babylonica
pour être précis), un saule, me fit un clin d'œil et une image aspirinée
s'imprima dans mon cerveau endolori. Ma tête fut guérie instantanément.
L'acide salicylique, vaporisé entre
ciel et fleuve, entre Dieu et Diable. Comme nous... xx Gé
Références Annexe Texte publié sur Repris de
Post-Scriptum : il faut
remarquer en passant que le drapeau qui sert à illustrer le timbre en
en-tête de cette page n'est pas conforme non plus (et ce n'est qu'une
question de couleur). Une montre construite
avec cet aplomb donnerait une heure pour le moins ambiguë (avec des
difficultés certains à se donner des rendez-vous). Le défaut de
contrôle de l'administration des Postes |
http://comme.des.manches.free.fr/teste_a_l_envers.htm
création
le 06.01.06
dernière modification le 14.04.06
article
original sur
http://wij.free.fr/eMMeM/drapeau.htm